Comment se crée un trouble de stress-post-traumatique (TSPT) chez l’enfant ?

Vous avez découvert dans les articles précédents comment les évènements insupportables pour les enfants et nourrissons impactent leur système nerveux et leur capacité à s’apaiser et se réguler. L’article sur les besoins de l’enfant vous permet de comprendre l’importance des relations pour croître et s’estimer grâce à la rencontre et au soutien de l’entourage. 
Voici une description non exhaustive des contextes qui peuvent déréguler le système nerveux des enfants et l’empêcher de se développer sainement accroissant les chances de troubles cognitifs et affectifs.

Comment se crée un trouble de stress-post-traumatique (TSPT) chez l’enfant

La recherche a montré que l’impact des cris sur le système nerveux dure plus de 6 heures… idem pour le simple souvenir d’une colère violente.

Des événements uniques et ponctuels

Des menaces à l’intégrité corporelle de l’enfant qui ont laissé des traces. Par ex : cordon ombilical autour du cou à la naissance, chute d’un couffin ou des bras d’un parent, chute dans les escaliers, hospitalisation sans grand soutien, intervention chirurgicale invasive, morsure par un animal, accident de voiture, attaques terroristes, intoxication alimentaire ou pollution, incendie…

En cas de gestation perturbée

Tout ce qui se passe pendant la gestation concerne la mère et également le fœtus.
Par exemple : Détresse fœtale, gestation agitée ; pendant la grossesse : disputes, accident de voiture, chute, deuil ou divorce, guerre, attentats… ; alcoolisme, drogues 

Une étude publiée en 2005 dans le Journal of Clinical Endocrinology and Metabolism démontre que les bébés nés de femmes enceintes exposées aux attaques du World Trade Center présentaient les mêmes marqueurs biologiques de troubles de stress post traumatique (TSPT) que leur mère. (Yehuda et al.)

Des traumatismes d’origine relationnelle

Des situations moins visibles, apparemment moins dramatiques vues de l’extérieur qu’un incendie ou une attaque… et qui peuvent passer inaperçu.
Souvent renforcées par les faux-semblants et des apparences trompeuses. Pourtant l’impact du stress est intense, réel et aura d’autant plus de conséquences qu’il se répète, une fois, deux fois ou devient chronique.

Par exemple : négligence précoce, abus émotionnel, manque de syntonie ou d’accordage (comme les musiciens d’un orchestre qui s’accordent, harmonisent leurs instruments), autoritarisme, impatience, injustices, non-respect du rythme et des limites de l’enfant, insultes, mépris, critiques, moqueries…abus de toutes sortes, séparation brutale avec la nounou, décès d’un parent…

Des scientifiques de l’Université Notre-Dame, aux Etats-Unis, se sont aperçu que les personnes qui avaient été plus souvent portées et cajolées dans les premiers mois de leur vie, et n’avaient pas été laissées seules sur de longues durées, s’en tiraient beaucoup mieux dans la vie.
Parmi les 600 adultes testés, elles étaient en meilleure santé, moins dépressives, dotées d’une meilleure capacité d’empathie et aussi nettement plus productives que celles qui avaient souffert d’un manque d’attention. Gina Louisa Metzler

Parents sont très attentifs mais crispés sur les normes

Etouffants ou rigides, sans tolérance créant un espace étroit où l’enfant ne peut respirer. Celui-ci est valorisé quand il valorise ses parents, soutenu uniquement quand il suit à la lettre les règles de vie, les principes familiaux, le conditionnement culturel ou religieux.

Violence passive

silence permanent imposé, rejet, humiliations, trahisons, médisance, triangulation relationnelle …
Par exemple : Caroline assistait aux critiques de son père envers sa mère, qui se plaignait, cherchant ensuite du réconfort et du soulagement auprès de sa fille.
Enfant, elle était malheureuse de voir sa mère perturbée et prenait inconsciemment parti pour elle, s’éloignant de son père dénigrant. Dans cette posture relationnelle, les besoins de Caroline étaient ignorés -c’est l’enfant qui doit être soutenu par les adultes et pas le contraire. Caroline a conservé cette tendance à agir en sauveur, adulte qui nie ses émotions et besoins pour se mettre à la disposition des autres et servir leurs besoins. Caroline avoue même ressentir une fierté à s’oublier pour les autres et se rendre indispensable. Elle n’est pas consciente de ses vrais besoins et en ressent une frustration qui s’exprime lors de colères inattendues.  Dans cet exemple de triangulation relationnelle, la mère est dans le rôle de victime, la fille dans le rôle de sauveur et le père celui de bourreau ou persécuteur. Voir sur wikipedia « le triangle de Karpman, triangle infernal » ou « relation svp, sauveur, victime, persécuteur. »

Des contextes favorisant le TSPT chez l’enfant

De nombreuses croyances fausses

De nombreuses croyances fausses mais encore bien présentes dans les mentalités contribuent à « faciliter » les traumatismes chez les petits enfants.  La plus nocive est, à mon avis, l’idée que « le bébé ne se souvient de rien ». Il y a aussi les idées telles que « le consoler va le rendre capricieux », « le prendre dans les bras va l’habituer et le gâter » ou « le laisser pleurer la nuit va l’aider à faire ses nuits ». Ou un bébé c’est un tube digestif.

La pauvreté et les crises

La pauvreté et les crises, la peur du lendemain, une nourriture insuffisante ou peu variée, un habitat précaire et bruyant peuvent nuire au bon développement de l’enfant. Cette fragilité sociale ne favorise pas le plein épanouissement mais j’ai rencontré en Inde et en Afrique des enfants vivant sous le seuil de pauvreté mais portés, soutenus physiquement, vifs et agiles qui rayonnent et ont des corps et des dents splendides.  Le contexte de familles aisées où les deux parents privilégient leur travail, leur vie sociale ou culturelle crée aussi des carences affectives et relationnelles qui empêchent l’harmonisation du système nerveux autonome. Comme l’a démontré l’affaire Camille Kouchner la maltraitance et le trauma n’appartiennent à aucun milieu.

Les parents eux-mêmes traumatisés

 Les guerres font des dégâts qui s’insinuent dans les familles sur plusieurs générations, les incestes et la misère aussi. Les symptômes de stress post traumatique sont durs à subir pour l’entourage et créent un chaos en alternance : parent imprévisible, colérique, dépressif, psychorigide, workaholique, narcissique, phobique, bipolaire, ambigu, alcoolique ou addict à différentes substances. L’enfant est souvent le bouc émissaire de ces symptômes ingérables. C’est le cycle de la retraumatisation transgénérationnelle.

Les foyers disharmonieux

parents en deuil, disputes régulières, violence conjugale ou familiale, violence verbale, divorce mal vécu, familles recomposées en difficulté, ou au contraire violence passive.

Dans un tel contexte, l’enfant se sent confus, perdu, sans repères, et surtout, seul et impuissant, ce qui renforce encore sa détresse. La honte, secrète est toujours là qui se terre. Le comportement de l’enfant alterne, entre haute activation et paralysie, son système nerveux se fige, il n’a plus accès à ses ressources internes et externes, sa conscience se dissocie. Il se développe comme il peut ; son adaptation indsipensable mais mutilante, utile dans ce contexte déficient, devient une limitation plus ou moins pathologique quand il devient adulte. Chaque style d’adaptation est différent et permet cependant de fonctionner au quotidien.

On peut hélas maintenant y ajouter la situation sanitaire particulière de 2020 et 2021 avec la covid 19. Comment vont se développer tous ces petits qui auront respiré à moitié et très peu vu les bouches souriantes, les joues offertes aux baisers, les mentons rieurs ? Heureusement l’humain a une grande capacité de résilience si on sait rééquilibrer ce potentiel et lui faire confiance.

Les cris impactent 6 heures le système nerveux des enfants

Trouble de stress-post-traumatique chez l’enfant

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